Ligue de Football Professionnel du Cameroun : Quel professionnalisme ?
● Si les informations glanées ça et là se confirment, le stade de la Réunification de Douala sera le théâtre d'une rencontre historique.... [Lire la suite]
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10 Juillet 2010
● Diriger une sélection nationale n'est pas une tâche de tout repos. A la suite de la tribune de l'un de nos contributeurs, Jacques Zanga, qui a abordé intelligemment le titre et le rôle du capitanat, nous essaierons de défricher la fonction d'entraîneur-sélectionneur qui fait tant couler de salive et d'encre depuis plusieurs semaines.
Mettre en place de nos jours les meilleurs joueurs disponibles d'un pays et leur donner une âme est un beau défi pour plusieurs aventuriers. Les véritables spécialistes du football, formés à coups de veilles stratégiques dans les officines des directions techniques nationales, ne savent souvent plus ou donner de la tête. Le fait surtout à une compétition éparse dont les joueurs sont balladés aux quatre coins du monde. Le fait aussi au peu de temps désormais consacré aux rassemblements préparatoires. Du coup, l'esprit "national" et la cohérence du jeu ne sont plus vraiment disponibles quand on le veut.
Un entraîneur compétent
La compétence se juge aux qualifications académiques du postulant, à son expérience du poste et aux solutions proposées à l'équipe dont il prend la charge. Des centaines de techniciens sont formés chaque année à travers le monde mais au fil du temps, très peu en arrivent à exercer à un très haut niveau de compétition. Si les ligues de la CAF donnent un peu de chair à nos techniciens locaux, il va sans dire que leur gestion de groupe au niveau mondial demeure vague.
En dehors d'une poignée de "fonctionnaires", malheureusement trop marqués au pays, un recensement rapide nous amène à conclure que nous demeurons largement dépendants de la "production" extérieure. Il nous revient donc nécessairement d'adjoindre à ces "importés", des entraîneurs nationaux qui se frotteront ainsi à un aprentissage sur le terrain, qui demeure la meilleure école de formation. Cela a été fait par le passé. Après, quitte aux dirigeants de les lancer dans le grand bain à temps et permettre à une "filière camerounaise" de se renouveler naturellement. Cela n'a jusqu'à présent pas été possible en raison des ruptures dans ce continuum.
Un coach ambitieux et leader
On ne peut choisir le métier d'entraîneur de football sans des idéaux clairs, sans des projets de vie, sans la volonté d'apporter à la discipline des améliorations originales. Dans la cohorte de mercenaires en fonction à travers le monde, force est de constater qu'on a généralement affaire à des monstres froids, soucieux de leur cv plus que de la place qu'ils laisseront à l'histoire du football. Oui, comme il y a des joueurs d'exception, il y a des entraîneurs-sélectionneurs d'exception. A la seule diférence que ces derniers disposent d'un recul qui leur donne une très large mesure de préparation, d'idéation et d'exécution.
Helenio Herrera et le "Catenaccio", Rinus Michels puis Stefan Kovacs et le "football total", deux repères dans le cours du football moderne et deux conceptions du jeu qui durent encore. C'est également le cas de généreux techniciens comme Michel Hidalgo ou encore Télé Santana, véritables icônes de leur temps. Le Français et le Brésilien osèrent régulièrement défier les lois du jeu en livrant des configurations inédites. Ce fut le cas avec leurs profusions de milieux offensifs qui permirent au premier de défier de grandes puissances du football et au second de disposer de quelques unes des formations les plus agréables à voir évoluer.
Toutefois, l'ambition et la créativité ne sauraient à elles seules garantir les succès. C'est pourquoi une bonne dose de réalisme s'impose au moment opportun. Cette science des circonstances fait la marque des grands entraîneurs-sélectionneurs. On l'a vu avec Paul Le Guen dans les trois matches de poule, le total désarroi de Diego Maradona face à l'Allemagne de Joachim Loew et ce dernier presque sans ressources face à la Furia Roja de Vicente del Bosque. Le leadership des entraîneurs-sélectionneurs est dans ces cas, largement sollicité dans l'approche psychologique des rencontres de haut-niveau où l'importance de l'enjeu tétanise les plus frileux.
Un sélectionneur présent
Si la sélection nationale suppose un regroupement des meilleurs éléments camerounais de tous les horizons, ces derniers doivent retrouver leur entraîneur sur les installations officielles des sélections nationales, au Cameroun. Les circonstances exceptionnelles d'un site de compétition particulier comme les pays en altitude, peuvent imposer de nous préparer dans ces conditions au sein de structures adéquates. Ce qui veut dire qu'en attendant des centres de haute-performance à Buéa, Nkongsamba ou Batié, il faudra s'en remettre aux installations kenyanes, sud-africaines ou autrichiennes, voire suisses.
Un sélectionneur présent au Cameroun signifie aussi une saine proximité avec les instances dirigeantes du football camerounais, pour un engagement plus évident et le règlement plus rapide de questions pratiques grâce à une meilleure lecture du vécu local.
Un sélectionneur sur place, c'est aussi l'occasion de trouver des solutions d'effectif dans le vivier local où progressent de très bons éléments malgré le niveau relativement moyen de nos ligues. Cette solution facile qui consiste à parcourir les sentiers européens et asiatiques pour s'en remettre aux seuls professionnels est une aberration. D'aucuns pensent que cela facilitera et réduira les coûts des rassemblements en plus d'éloigner les intrusions intempestives des autorités et autres "personnalités" dans la vie du groupe. Rien n'est moins sûr. S'en tenir généralement à des mises au vert en Europe dénature aussi l'essence de la sélection nationale. Loin de ses bases, elle ne dispose aucunement de l'environnement nécessaire à l'émulation des troupes, du moins en ce qui nous concerne. A nous de démontrer notre maturité en nous occupant, chacun, de nos affaires.
Un sélectionneur indépendant
La sérénité requise pour diriger une sélection nationale demande un respect minimal des prérogatives du sélectionneur et son staff. Les prescriptions "venues d'en haut" doivent cesser. Nous devons également arrêter de croire en des victoires à tout coup. Choisir une direction nationale conséquente et attribuer un mission à long terme aux coachs des sélections nationales impose d'être patients. Dans les nécessaires rapports d'étapes de ce projet, on pourra suggérer des ajustements sans pour autant dénaturer la démarche des titulaires en poste. Cette indépendance doit s'accompagner d'un traitement à la hauteur des ambitions mais dans les limites du raisonnable, et cela pour TOUS, nationaux comme expatriés.
Ce sont là quelques critères qui pourront, nous pensons, permettre d'éclairer dans le choix de l'homme providentiel. Mais comme le ciel n'est à l'écoute que de ceux qui osent, et osent franchement, il ne reste plus qu'aux dirigeants concernés de parfaire leur grille d'évaluation et dénicher la perle rare.
Léopold Nséké
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